Depuis lâĂąge de 7 ans, Beatriz Gonzalez vit dans une cuisine. Chez ses parents, dâabord, sur lâĂźle paradisiaque de Cozumel, Ă lâest du Mexique. Ancien militaire, son pĂšre a tout lĂąchĂ© pour y ouvrir un grand restaurant. Elle se prend au jeu et sa vie bascule lorsque son pĂšre lâenvoie en France Ă 17 ans, Ă lâInstitut Paul Bocuse. Elle y tombe amoureuse de la cuisine française et de Matthieu Marcant, son mari et associĂ© dans les deux restaurants quâelle dirige Ă Paris, Neva Cuisine et Coretta. FormĂ©e chez Pierre Orsi, Ă Lyon, Alain Senderens, au Lucas Carton, et FrĂ©dĂ©ric Robert, Ă la Grande Cascade, elle revendique une cuisine bistronomique. Entre deux services, elle grignote un morceau de Salers ou de ComtĂ©, la plus française des Mexicaines.
Mexique
Le restaurant de mes parents, au Mexique, Ă©tait construit sur deux Ă©tages. En montant vers la salle, il fallait passer devant la grande cuisine. Je la revois encore, avec son Ă©norme hotte, et toutes les odeurs qui sâen dĂ©gageaient. Poisson, viande, la sauce tomate Ă©picĂ©e que lâon prĂ©parait en la touillant dans de grandes marmites pour le poisson cuit dans une feuile de banane, mais aussi les parfums de tortillas frites que lâon appelle tostadas.
Mon pĂšre Ă©tait Ă©tonnĂ© : « Pourquoi faire ce mĂ©tier alors que tu ne nous voyais jamais, que tu Ă©tais obligĂ©e de venir au restaurant pour passer du temps avec nous ? » Mais il a vu que jâĂ©tais vraiment dĂ©cidĂ©e et tĂȘtue. Il mâa dit un jour : « Tu veux faire la cuisine ? Il y a un chef connu qui a ouvert une Ă©cole Ă Lyon, câest le meilleur, il paraĂźt ». Il pensait que je reviendrais pour reprendre le restaurant mais je suis tombĂ©e amoureuse de la France. Depuis, il me soutient, il mâa toujours encouragĂ©e Ă ouvrir mon restaurant alors que moi, jâavais envie de continuer Ă travailler avec plein de grands chefs.
Nous, les Mexicains, on a de grandes familles. Le fait dâĂȘtre toute seule Ă lâĂ©cole, de ne pas parler la langue, câĂ©tait difficile. Mais dans mes premiers stages, quand on me demandait « rapporte ceci, va chercher cela », jâai su quâil fallait que jâapprenne, que je comprenne, sinon quelquâun dâautre prendrait ma place.
Câest un mĂ©lange de mon histoire, et de tous les goĂ»ts que jâai rencontrĂ©s jusquâĂ maintenant. Les gens qui me connaissent savent quâil va y avoir du peps dans mes assiettes, des goĂ»ts quâil faudra aller chercher, avec une structure trĂšs prĂ©cise.
On en mange mais il nâest pas goĂ»teux comme les fromages français. On a des fromages neutres, pour la dĂ©coration ou Ă faire fondre, comme dans la quesadillas, le goĂ»ter salĂ© de tous les Mexicains.
Quand on mâa appelĂ©e pour Sweet Cheese, jâĂ©tais heureuse parce que jâadore les dĂ©fis, mais aussi parce que câĂ©tait lâoccasion de travailler en Ă©quipe. Sans une brigade merveilleuse, une cheffe nâest rien. Tout le monde a participĂ©, câest mon mari qui a eu lâidĂ©e du jeu de mots. Dans mon enfance, mes deux desserts prĂ©fĂ©rĂ©s, câĂ©tait la crĂšme caramel et le riz au lait. Au Mexique, on nây met pas de cannelle mais des fruits confits, des agrumes. GrĂące au jeu de mots de Mathieu, on est parti sur lâidĂ©e de remplacer le lait et le sucre par du Brie. Jâaime tous les fromages français mais jâaime bien le cĂŽtĂ© moelleux du Brie. Il vient enrober le riz Ă la cuisson. Ăa donne un cĂŽtĂ© nacrĂ© incroyable, jâaurais pu le servir juste dans un bol pour admirer la brillance du rĂ©sultat. Pour rafraĂźchir le tout, jâai pensĂ© Ă la pomme, en trois textures, crue, dĂ©shydratĂ©e et en gelĂ©e. Câest un vrai dessert quâun Mexicain pourrait manger les yeux fermĂ©s !
Coretta
151 bis rue Cardinet
75017 Paris
www.restaurantcoretta.com
+33 (0)1 42 26 55 55
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