Le goĂ»t de manger est arrivĂ© tĂŽt, celui de cuisiner plus tard. Chignon bricolĂ© Ă la va-vite et allure juvĂ©nile, Elsa Marie semble avoir trouvĂ© sa place. AprĂšs un long voyage aux antipodes, elle est revenue Ă Paris, dĂ©sormais cheffe du restaurant La Vierge. « Un lieu convivial, dĂ©tendu, abordable et oĂč lâon mange bien, parce que câest possible », prĂ©cise-t-elle. EngagĂ©e pour une agriculture durable, elle source ses produits avec soin, cuisine le midi des assiettes vives Ă prix doux, et laisse Ă son mari, Julian, les tapas et plats Ă partager du soir. Pour Sweet Cheese, elle a redĂ©couvert lâAbondance, et on ne sâen plaint pas.
France
Jâai grandi Ă la campagne. Ma mĂšre travaillait mais se mettait aux fourneaux, on mangeait trĂšs bien, on avait toujours entrĂ©e, plat, dessert. Ăa a dĂ» avoir un impact sur moi mais je nâai pas cuisinĂ© avant lâĂąge de 18 ans. Je faisais des Ă©tudes de lettres, finis les petits plats de maman, jâai commencĂ© Ă faire Ă manger pour moi et mes copains. Câest devenu obsessionnel et je me suis dit que je pouvais avoir ma place dans cet univers. Jâai suivi les cours de lâĂ©cole Ferrandi pendant 1 an. Au dĂ©part, je voulais intĂ©grer leur classe supĂ©rieure mais jâĂ©tais dĂ©jĂ bac+3, jâai eu envie de plonger dans le grand bain.
Au bout de 3 semaines, jâai su que ce nâĂ©tait pas pour moi. Câest un mĂ©tier terrible, avec des horaires impossibles, on est mal payĂ©, on nous parle mal. Mais, en mĂȘme temps, ça me plaisait vraiment, câĂ©tait le seul endroit oĂč je ne voyais pas le temps passer, jâapprenais tous les jours. Mais jâaurais pu arrĂȘter, pour avoir du temps pour moi, pour Ă©crire plus.
Jâai rencontrĂ© GrĂ©gory Bach et Florent Ciccoli, qui ont plusieurs restaurants Ă Paris. Jâai trouvĂ© une mentalitĂ© trĂšs diffĂ©rente. Ils sont trĂšs humains, ils font confiance, ils laissent de la libertĂ©. Jâai travaillĂ© chez eux pendant 2 ans, aux PĂšres Populaires. Et aujourdâhui, je suis cheffe de leur nouveau restaurant, La Vierge.
Les cuisiniers finissent toujours par tourner en rond, ils pensent quâils trouveront mieux ailleurs. Jâallais avoir 30 ans, jâai eu envie de partir trĂšs loin, oĂč il fait chaud, oĂč la vie est facile. Jâai pris un gros sac Ă dos, direction lâAustralie. Jâai un peu cuisinĂ© mais je me suis surtout intĂ©ressĂ©e Ă la permaculture, Ă la biodynamie.
En Australie, jâai trouvĂ© un mari, Julian, chef lui aussi. Il revenait de France et voulait y retourner, en Auvergne pour la cuisine et les fromages. Chez lui, on a la volontĂ© de faire du fromage mais ça nâest jamais un franc succĂšs. Aujourdâhui, Ă chaque fois que lâon discute avec Julian de lâendroit oĂč lâon pourrait vivre, on est toujours dâaccord : il faudra quâil y ait du fromage !
Le fromage est une addiction pour moi et lâAbondance lâun de mes fromages prĂ©fĂ©rĂ©s, mĂȘme si je lâavais un peu oubliĂ©. Il se rapproche du ComtĂ©, en plus fruitĂ©, plus crĂ©meux et plus long en bouche. Jâai voulu le travailler dans un dessert en plusieurs textures. Il se retrouve dans la crĂšme fouettĂ©e mais aussi glacĂ© et rĂąpĂ©. Les poires sont pochĂ©es et jây ajoute un crumble au romarin, dont jâaime bien lâamertume. Je suis rĂ©ticente sur le sucrĂ©-salĂ©, il y a une Ă©poque oĂč on essayait de tout mettre en dessert, du sorbet au foie gras ou au camembert. Je ne dĂ©nature pas souvent le fromage mais lĂ câĂ©tait un beau dĂ©fi, intĂ©ressant Ă relever. Quand jâai imaginĂ© la recette, on Ă©tait en hiver, on avait des poires exceptionnelles, Louise Bonne, Comice, ConfĂ©rence, ça a marchĂ© tout de suite. Je voulais du fruit pour contrebalancer la puissance du fromage.
La Vierge
58 rue de la Réunion
75020 Paris
www.alaviergedelareunion.fr
+33 (0)1 43 67 51 15
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